E2C Normandie : Hérouville Saint-Clair joue la carte de la formation sur mesure

© E2C Normandie

Hérouville Saint-Clair a fait sien le principe de Condorcet et ose « tout examiner, tout discuter, tout enseigner.» Depuis janvier 2017, la ville accueille l’E2C Normandie, toute première École de la 2ème Chance dans la région. Un projet porté conjointement par l’État, la Région, le département du Calvados, la municipalité hérouvillaise, la communauté urbaine de Caen la mer et la Caisse des dépôts et consignations. Seule leur motivation a permis aux vingt-huit premiers jeunes, âgés de 16 à 25 ans, d’intégrer l’aventure E2C Normandie. Au-delà de l’obtention d’une qualification ou d’une formation, il s’agit de faire éclore les talents et les compétences de cette jeunesse que le système scolaire classique n’a pas su accompagner.

Pourquoi ?

Rodolphe Thomas, maire d’Hérouville Saint-Clair et Président de l’E2C Normandie est convaincu que la formation est le corollaire d’une intégration sociale et économique réussie. Le travail crée du lien et les formations proposées dans le cadre de l’E2C Normandie vont offrir à leurs bénéficiaires le goût de l’autonomie et les bons outils pour s’insérer dans le monde de l’entreprise. Un coup de pouce pour prendre le train en marche, faire les bonnes rencontres professionnelles et éviter ainsi chômage et isolement.

Plus d’un tiers de la population hérouvillaise a entre 15 ans et 30 ans. La jeunesse est donc l’une des richesses de ce territoire qu’élus et acteurs économiques entendent bien mettre en valeur, notamment par l’implantation de ce nouvel établissement.

Comment ?

Ouverte à l’initiative de la Région qui finance le projet à hauteur d’un tiers (assurant ainsi la rémunération des stagiaires tout au long de leur formation), l’E2C Normandie possède le statut d’association 1901, mais elle est aussi intégrée au réseau national des E2C via lequel une étude de faisabilité a été conduite en amont de sa création, notamment auprès des entreprises implantées localement, garantes du succès de l’établissement. Très vite de premiers partenariats se sont noués avec les Chambres de commerce et d’industrie, des acteurs locaux et nationaux d’envergure comme la fondation de la quincaillerie Legallais, Orange ou encore ERDF, tandis que d’autres conventions sont encore à venir.

Les candidats à la formation E2C Normandie doivent être âgés de 16 à 25 ans lors de leur entrée dans l’établissement. Une dérogation est possible pour les bénéficiaires du RSA âgés de plus de 25 ans. Chaque aspirant stagiaire passe par une période d’essai de cinq semaines. Une période au sein de l’école et l’autre en entreprise. Il s’agit d’évaluer la solidité de sa motivation et sa capacité d’adaptation aux codes du monde de l’entreprise et aux échanges dans un cadre professionnel. Une fois admis, le stagiaire signe un contrat d’engagement et se voit offrir une prise en charge globale qui dure en principe de six à neuf mois et s’articule autour de 3 pôles principaux :

  • Un pôle pédagogique : les stagiaires sont répartis en groupes d’une quinzaine de personnes et disposent d’un formateur référent. Des aides sont proposées à chaque stagiaire, au cas par cas. Il peut s’agir par exemple d’améliorer la maîtrise de la langue française, de solidifier des bases en mathématiques ou encore de renforcer la pratique d’une langue étrangère.
  • Un pôle insertion socioprofessionnelle : souvent, les stagiaires des E2C sont un public en difficulté, qu’elle soit légère ou conséquente. Une conseillère en insertion professionnelle, présente à temps plein à l’école, est à leur écoute et les accompagne pour envisager des solutions à leurs problématiques qui dépassent souvent le simple cadre de la formation : logement, finances, mobilité, addiction, problèmes de santé, précarité etc. Tout est fait pour remettre le stagiaire en selle, le préparer à une vie autonome et l’aider à retrouver ou à acquérir une estime de soi positive.
  • Un pôle relation avec les entreprises : Chaque stagiaire est, en alternance, trois semaines au centre de formation et deux semaines en entreprise. Ils ne restent pas dans la même entreprise, il s’agit de leur faire découvrir différentes facettes du monde professionnel. Ce sont des stages d’observation, de découverte d’un métier. Dans cette optique, ils sont accompagnés à temps plein par une chargée des relations en entreprise qui leur dispense des ateliers de TRE (Technique de Recherche d’Emploi) durant lesquels ils retravaillent notamment leur CV et rédigent des lettres de motivation.) Dans ce cadre L’E2C s’appuie également sur la compétence de l’AFPA, l’Association pour la Formation Professionnelle des Adultes.)

Quel bilan ?

L’E2C Normandie accueillera 104 stagiaires d’ici la fin de l’année 2017 puis à terme, environ 150 chaque année dès 2018. Les premiers stagiaires sont essentiellement hérouvillais, mais l’école a pour vocation le rayonnement régional.

Les formations fortement individualisées de l’E2C Normandie portent déjà leurs fruits puisque Jean, ancien stagiaire, a intégré le groupe La Poste en contrat de professionnalisation. Une première sortie positive précoce qui donne de l’énergie à l’équipe de formateurs et encadrants. Contrat d’apprentissage, formation diplômante ou retour à l’emploi sont les objectifs de l’E2C Normandie pour ses stagiaires.

Au-delà des bénéficiaires directs des formations, c’est tout un quartier d’Hérouville qui est à nouveau irrigué grâce à l’ouverture de l’E2C Normandie : lors de la fermeture du collège Boisrobert à la Grande Delle, un QPV (Quartier Prioritaire des politiques de la ville, ex-ZUS, Zone Urbaine Sensible), le maire, Rodolphe Thomas a souhaité conserver les locaux afin d’y intégrer un centre de formation de ce type. Aujourd’hui les bâtiments de l’ancien collège sont partagés entre l’E2C et une école primaire. Comme le souligne un habitant de la Grande Delle : « le collège était fermé depuis des années. Cela ramène de la vie dans le quartier ! »

Le projet en photos

Interview de Rodolphe Thomas, Maire d’Hérouville Saint-Clair et Président de l’E2C Normandie

© Agence Frank Castel photographie

Pourquoi avez-vous souhaité l’implantation de l’E2C à Hérouville Saint-Clair ?

C’était un projet qui me tenait à cœur depuis longtemps. Chaque année en France, 110 000 jeunes sortent du système scolaire sans diplôme ni qualification. En tant que maire d’Hérouville depuis 2001, je ne cesse de rencontrer dans mes permanences de jeunes adultes à la recherche d’une formation ou d’un emploi. Sans diplômes et sans qualifications, trouver un travail relève pour eux du parcours du combattant.
L’École de la 2ème Chance Normandie s’inscrit pleinement dans les enjeux de la politique de la ville : d’une part, le dispositif cible l’accès à l’emploi et la professionnalisation des jeunes et d’autre part, il concentre les forces vives d’un territoire autour de l’employabilité des jeunes.
Le site retenu du collège Boisrobert est implanté à la Grande Delle, un QPV (Quartier Prioritaire de la politique de la Ville) desservi par des lignes de bus. De plus, il n’est qu’à 10 minutes à pied du cœur de ville et de la cité administrative et culturelle. L’implantation géographique de l’E2C permet également à des jeunes issus d’autres QPV de l’agglomération caennaise d’y accéder par le bais d’un réseau de transports particulièrement actif.

L’implantation de l’E2C à Hérouville Saint-Clair s’inscrit dans une politique municipale pour la jeunesse et l’insertion sociale ambitieuse, pouvez-vous nous en livrer les autres grands axes ? 

La Ville a usé de la clause générale de compétence pour développer une politique d’emploi, d’insertion sociale et professionnelle de proximité. Cette politique, portée par la Ville et son CCAS (Centre Communal d’Action Sociale), en partenariat avec les acteurs de l’emploi et du développement économique du territoire, se décline selon 4 axes.

  • En 2002, nous avons créé une mission emploi-insertion. Une CSE (Correspondante Solidarité Emploi) reçoit tous les Hérouvillais qui ont une question relative à leur insertion sociale et professionnelle pour les orienter et les accompagner. Chaque année, ce sont près de 300 personnes qui bénéficient de cet accompagnement.
  • Nous organisons également des temps forts pour mettre en relation les employeurs et les demandeurs d’emploi : matinées de l’emploi, forum…
  • Nous développons des supports permettant la remobilisation, l’acquisition de compétences et l’amorçage d’une insertion professionnelle : chantiers d’insertion, ateliers d’insertion, emplois d’avenir, contrats d’apprentissage, clause d’insertion… Enfin, nous soutenons des projets associatifs qui œuvrent en faveur des publics les plus éloignés de l’emploi pour favoriser l’obtention du permis de conduire, amorcer un projet…

La mise en place de l’E2C a pris plusieurs années, quels ont été selon vous les freins principaux à sa mise en place, mais aussi les leviers qui ont finalement permis la concrétisation d’un tel projet ?

L’ancienne majorité régionale n’a jamais voulu donner suite à ce projet, car elle considérait qu’il existait suffisamment de dispositifs en faveur de la formation et de l’accès à l’emploi pour les jeunes. Depuis décembre 2015, Hervé Morin préside la Région Normandie et, à ses côtés, en tant que vice-président chargé de la politique de la Ville et de la cohésion sociale, je lui ai présenté avec succès ce projet de l’E2C. Elle a été créée fin décembre 2016 avec l’aide du Département, de la Région et de l’État. Cette école est complémentaire des dispositifs existants et permet un parcours individualisé et d’accompagnement des jeunes vers un emploi et/ou une qualification. Chaque promotion est composée d’un petit groupe de 15 stagiaires. A terme, 150 à 180 stagiaires pourront être accueillis à l’E2C à Hérouville.

En matière d’éducation, de jeunesse et d’insertion, quel est votre appel aux candidats de la toute prochaine élection présidentielle ?

Il faut travailler selon deux axes principaux : l’alternance et l’apprentissage, en s’interrogeant sur la non qualification des jeunes. Pour ma part, je soutiens que les jeunes doivent bénéficier de stages en entreprises dès le Collège et s’immerger dans le monde du travail pour découvrir plusieurs métiers. Ce n’est pas dans notre culture française de rapprocher les lieux d’enseignement et les entreprises. Les jeunes doivent avoir la possibilité de découvrir plusieurs métiers pour être en capacité de construire leur avenir professionnel. C’est pourquoi, j’invite les candidats à réfléchir sur les moyens à mettre en place pour rapprocher le monde de l’entreprise de l’éducation Nationale.

 

Fiche d'identité de la communeLe projet en chiffresPour aller plus loin
  • Commune : Hérouville Saint-Clair
  • Département : Calvados (14)
  • Région : Normandie
  • Population : 21 393 habitants
  • Maire : Rodolphe Thomas (MoDem)
  • Site internet : www.herouville.net
  • 110 E2C réparties en France métropolitaine et Outre Mer
  • Plus de 15 000 jeunes accueillis en 2016 dans le réseau E2C France
  • 59 % de sorties positives en 2015
  • Plus de 80 000 stagiaires ont bénéficié de la formation E2C
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