Laïcité : jusqu’où étendre l’obligation de neutralité ?

En quelques jours, une déclaration publique et deux propositions de lois sont venues relancer le débat sur le voile et la laïcité. Revue de détail.

Au nom de « la confiance entre les parents et l’école ». La déclaration est celle de Najat Vallaud-Belkacem, auditionnée le 21 octobre dernier par l’Observatoire de la laïcité. S’appuyant sur une décision du Conseil d’Etat datant de juin dernier et affirmant que « les parents accompagnant des sorties scolaires ne sont pas soumis à la neutralité religieuse », la ministre de l’Education nationale a demandé la plus grande tolérance à l’égard des mères voilées, ajoutant que « l’acceptation de leur présence aux sorties scolaires devait être la règle et le refus l’exception ». Cela au nom d’un objectif réaffirmé par elle à de multiples occasions depuis la rentrée scolaire : le rapprochement école/parents, notamment dans les quartiers populaires, pour lequel la ministre a déjà lancé un « Café des parents » au ministère, et repris l’idée de la loi Peillon et de sa circulaire du 17 octobre 2013, « d’espaces parents » au sein de tous les établissements du primaire et du secondaire.
Le lendemain, 22 octobre, deux propositions de loi étaient déposées à l’Assemblée nationale par l’opposition parlementaire, proposant au nom de la laïcité, de renforcer la législation en vigueur sur l’interdiction des signes religieux dans l’éducation et le secteur de la petite enfance.

Neutralité à l’école, au sens large. Pour Eric Ciotti, député UMP des Alpes-Maritimes, auteur de la première proposition de loi, l’interdiction du port de signes religieux ne doit pas s’appliquer aux seuls agents du service public, mais à tous ceux qui, fonctionnaires ou pas, interviennent à l’école publique ou se trouvent associés à l’œuvre d’éducation qui est la sienne. Celui-ci propose donc à l’inverse de la ministre, que « lorsqu’ils accompagnent les élèves lors des sorties et voyages scolaires, le port de signes ou tenues par lesquels les parents d’élèves manifestent ostensiblement une appartenance religieuse soit interdit ».

Neutralité dans les structures privées chargées de la petite enfance. Quant à la proposition de Michel Terrot, député UMP du Rhône, elle vise à « étendre l’obligation de neutralité aux structures privées en charge de la petite enfance et à assurer le respect du principe de laïcité ». Dans une référence explicite au combat juridique de la crèche associative Baby Loup – conclu en juin par la confirmation du licenciement de la salariée – elle entend consacrer l’obligation faite aux salariés des structures privées chargées de la petite enfance et subordonner au respect de la laïcité l’agrément délivré par le conseil général, aux assistantes maternelles et aux assistants familiaux.

En perspective, la laïcité dans les entreprises et les associations. Compte tenu des enjeux symboliques qui s’y attachent, le débat est probablement loin d’être clos. Ses prochains lieux de débat pourraient concerner l’espace public, les entreprises privées et les associations… dans lesquels le partage du privé et du public reste sujet à controverse.

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