Finances locales : les députés remanient largement le PLF 2016

Report de la réforme de la DGF à 2017 et montant pour 2016, modalités de la nouvelle baisse des dotations, évolution et répartition du FPIC, bonus pour les communes nouvelles, cotisation au CNFPT… Les députés ont remanié en profondeur le volet « finances locales » du budget 2016, lors de son examen en séance publique, lundi 9 novembre…

Les députés ont adopté en séance publique et en première lecture la mission « Relation avec les collectivités territoriales » ainsi que les articles qui lui son rattachés. Ces derniers concernent notamment le montant et la répartition de la DGF en 2016, le report de la réforme de la DGF à 2017, le prolongement sous conditions des incitations financières à la création des communes nouvelles, l’évolution du FPIC, la prise en compte des nouvelles métropoles du Grand Paris et d’Aix-Marseille-Provence et le maintien de la cotisation acquittée par les collectivités au profit du Centre national de la fonction publique territoriale (CNFPT).
Voici le détail des nombreuses modifications votées par les députés dans l’hémicycle, lundi 9 novembre 2015 :

  • Report de la réforme de la DGF à 2017 (art. 58)

Malgré de très nombreux amendements déposés, la réforme de la DGF n’a pas été modifiée sur le fond et reste donc identique au texte initial. Le seul changement, fruit d’un amendement du gouvernement, reporte sa date d’application au 1er janvier 2017 au lieu de 2016, conformément à l’arbitrage rendu par le Premier ministre la semaine dernière.
Les travaux sur la nouvelle architecture de la DGF et son articulation avec les évolutions de la carte intercommunale auront lieu l’année prochaine et associeront le Comité des finances locales, les associations d’élus et un groupe de travail parlementaire transpartisan. Le gouvernement devra remettre au Parlement, avant le 30 juin 2016, un « rapport circonstancié » sur ce dossier majeur.
A noter que le volet de la réforme qui concerne la péréquation verticale (DSU, DSR et DNP) et qui était très consensuel est, lui-aussi, gelé jusqu’en 2017. Les notions de DSU et DSR « cible » persisteront donc en 2016.

  • Répartition de la DGF en 2016 (nouvel art. après l’art. 58)

En cohérence avec ce report, le gouvernement a intégré la répartition de la DGF en 2016 ainsi que la nouvelle baisse des dotations.
Dans les faits, pour le bloc communal, les règles de répartition de 2015 sont reconduites en 2016 après certains ajustements liés à la population. La DSU et la DSR progresseront respectivement de 180 et 117 millions d’euros.
Enfin, sont également fixées pour 2016 les modalités de répartition de la DGF pour les métropoles du Grand Paris (MGP) et d’Aix-Marseille-Provence (MAMP).

  • Modalités de la baisse des dotations en 2016 (art. 58)

Parallèlement, les modalités d’application de la nouvelle baisse de 3,67 milliards d’euros des dotations en 2016 sont modifiées par deux amendements d’une grande importance pour le bloc communal.
D’une part, un amendement d’Olivier Dussopt (PS, Ardèche) inclut « les budgets annexes des services publics autres que les SPIC » dans l’assiette de calcul des recettes réelles de fonctionnement (RRF) sur laquelle est fondée la baisse des dotations alors que, jusque-là, seuls les budgets principaux étaient pris en compte.
D’autre part, un amendement d’Estelle Grelier (PS, Seine-Maritime) prévoit que cette assiette de calcul des RRF sera désormais minorée des remboursements des frais de fonctionnement entre une intercommunalité et ses communes membres.
Dans ce contexte et « pour rassurer les élus locaux », Marylise Lebranchu, la ministre de la Décentralisation, a proposé « une double garantie » concernant les effets cumulés de la réforme de la DGF et de la baisse des dotations sur l’évolution de la DGF. Ainsi :

  • cette baisse cumulée ne pourra représenter plus de 25 % des RRF d’une collectivité en cinq ans, soit de 2017 à 2021 ;
  • à compter de 2017, cette baisse cumulée ne pourra représenter, d’une année sur l’autre, plus de 10 % des RRF.

Reconnaissant que quasiment aucune commune ne serait concernée par ces plafonds, la ministre a admis qu’il s’agit « uniquement de garantir au Conseil constitutionnel qu’il n’y a pas de volonté du gouvernement de mettre en place un prélèvement confiscatoire » qui nuirait à la libre administration des collectivités.

  • Evolution du FPIC en 2016 (art. 61 et suivants)

Le montant du fonds de péréquation des ressources intercommunales et communales (FPIC) reste fixé à 1 milliard d’euros en 2016, comme dans le texte initial, ce qui représente tout de même une progression de 220 millions d’euros par rapport à 2015.
A noter qu’un amendement du gouvernement, pour préserver les communes pauvres situées dans des interco riches, coordonne les mesures d’exonération de contribution au FPIC pour les communes éligibles à la DSU cible et pour les 2 500 premières éligibles à la 3e fraction de la DSR.
En ce qui concerne la répartition du FPIC au sein des intercommunalités, un amendement de la commission des finances prévoit qu’à compter de la transmission de la proposition de répartition libre approuvée par l’interco, chaque commune dispose d’un mois pour l’approuver ou la rejeter. A défaut, son avis sera réputé favorable. La même disposition est prévue pour la répartition des attributions de compensation.
Néanmoins, une jauge protectrice est conservée puisque la majorité exigée au niveau de l’interco est celle des 2/3 des communes représentant au moins 50 % de la population, ou inversement.
A l’initiative d’Estelle Grelier, il sera désormais possible pour une intercommunalité d’exonérer de contribution au FPIC ses communes les plus défavorisées. Le différentiel sera prise en charge par l’interco et/ou les communes les plus favorisées. De même, Olivier Dussopt impose l’exonération de toutes les communes éligibles à la DSU et dont le potentiel financier par habitant est inférieur au potentiel financier moyen par habitant de leur strate. Le différentiel sera réparti entre les communes membres en fonction de leur contribution respective au FPIC.
A l’inverse, les 250 premières communes éligibles à la DSU cible bénéficieront d’une attribution au titre du FPIC, indépendamment de tout accord local si l’interco est attributaire du FPIC.
Dans la même logique, il est proposé par François Pupponi, qu’une commune, qui contribuait au FPIC dans son ancienne interco, mais qui en intègre une nouvelle non contributrice, reverse chaque année le montant de son ancienne contribution aux communes DSU cible et/ou ayant plus de 40 % de logements locatifs sociaux de ce nouvel ensemble sous forme de dotation de solidarité communautaire.
A noter, qu’à la demande de la majorité comme de l’opposition, un rapport annuel sur le FPIC sera désormais remis par le gouvernement au Parlement.

  • FPIC, métropole du Grand Paris et FSRIF (art. 61 et suivants)

En Ile-de-France, l’exécutif tire les conséquences de la création de la métropole du Grand Paris (MGP) sur le FPIC. Ce seront donc les établissements publics territoriaux (EPT) qui constitueront l’échelon de référence pour la répartition nationale du FPIC. La répartition interne entre les EPT et leurs communes membres se fera conformément aux règles de droit commun, en fonction du coefficient d’intégration fiscale. « L’objectif de ces dispositions est de neutraliser les effets au sein de la métropole mais aussi entre la métropole et le reste du pays », a expliqué Marylise Lebranchu.
Par ailleurs, à l’initiative des députés socialistes, le fonds de solidarité des communes de la région Ile-de-France (FSRIF) poursuivra en 2016 sa montée en puissance sur le même rythme annuel que depuis 2012, soit une progression de 20 millions d’euros à 290 millions d’euros.

  • Cotisation au CNFPT (art. 62)

L’article 62 qui abaissait à 0,8 % de la masse salariale la cotisation des collectivités territoriales au Centre national de la fonction publique territoriale (CNFPT) est supprimé par un amendement d’Hugues Fourage (PS, Vendée), au nom de la commission des lois et soutenu par la commission des finances. Par conséquent, le montant de cette cotisation reste fixé à 1 %.

  • Communes nouvelles (art. 58)

S’agissant des communes nouvelles, les députés ont décidé de prolonger, sous conditions, le dispositif d’incitations financières aux communes nouvelles. Ainsi, un amendement de Christine Pires Beaune (PS, Puy-de-Dôme), au nom de la commission des finances, prolonge ce bonus jusqu’au 30 juin 2016 à condition que les délibérations soient prises avant le 31 mars 2016.
En revanche, les députés ont supprimé, à compter du 1er janvier 2016, la dotation de consolidation accordée aux EPCI qui se transforment en commune nouvelle. De même, bien que le seuil pour le bonus de 5 % de DGF pour les communes nouvelles entre 1 000 et 10 000 habitants soit conservé à l’identique, l’exonération de baisse des dotations pendant trois ans a, elle, été plafonnée aux communes nouvelles de moins de 15 000 habitants, pour en limiter l’impact sur l’enveloppe globale de DGF.
Enfin, les députés ont maintenu ces incitations financières dans le cas où une commune seule rejoint une commune nouvelle déjà créée. Cependant, cela ne relancera pas le délai de trois ans.

  • Quartiers prioritaires de la politique de la ville et Anru (art. 58)

Le groupe RDSE propose d’expérimenter, à compter de 2016 et pour trois ans maximum, une dotation de compensation spécifique de l’extension de l’abattement de 30 % de la taxe foncière sur les propriétés bâties aux 1 500 quartiers prioritaires de la politique de la ville afin de compenser le manque à gagner pour certaines collectivités en difficultés. Par ailleurs, la dotation politique de la ville pourra désormais être attribuée en fonctionnement.
Enfin, un amendement socialiste sécurise les dotations forfaitaires des communes populaires concernées par des grosses restructurations de rénovation urbaine en gelant la population dite DGF sur la période de la convention de rénovation urbaine.

  • Loi SRU et péréquation verticale (nouvel art. après l’art. 58)

Un amendement de Christine Pires Beaune, pour la commission des finances, concerne les 218 communes se trouvant en état de carence par rapport à leurs obligations prévues par la loi SRU en matière de construction de logements sociaux. Ces communes ne pourront plus bénéficier ni des dotations de péréquation verticale, ni du FPIC.

 

Focus
Autres dispositions

L’Assemblée nationale a également adopté un amendement qui précise les majorités qualifiées requises pour un certain nombre de délibérations des organes délibérants des EPCI à fiscalité propre en réaffirmant qu’elles sont fondées sur les suffrages exprimés. Par ailleurs, le gouvernement à introduit ou reconduit trois aides financières pour les communes qui :
– souhaitent étendre les horaires de leurs bibliothèques publiques ;
– doivent héberger en urgence ou reloger des personnes dans le cadre du fonds d’aide pour le relogement d’urgence ;
– ou acquièrent des équipements nécessaires à l’utilisation du procès-verbal électronique.
Enfin, un article prend en compte les spécificités du département de Mayotte.
En revanche, le fonds de soutien de 800 millions d’euros en faveur de l’investissement du bloc communal (art. 59) n’a pas été modifié, ni la mission « Relation avec les collectivités territoriales » (art. 60).

Article vu sur :
http://www.lagazettedescommunes.com – du 10 novembre 2015

 

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