Communiqué de presse – Débat à Evry Courcouronnes, la suite

COMMUNIQUÉ DE PRESSE :

Débat à Evry Courcouronnes, la suite

Lyon, le 6 février 2019

Plusieurs maires membres du Conseil d’administration de l’association des maires Ville & Banlieue de France ont pu intervenir à l’occasion de la séance du « Grand débat » organisée à Evry Courcouronnes (91). Heureuse initiative pour faire connaître à la France entière les particularités de nos territoires, leurs difficultés et leurs potentiels, leurs espoirs et leur soif de République.

Mais si le Président de la République a été à l’écoute, il ne ressort pas grand-chose de cet événement.

Bien sûr, les inquiétudes des petites associations agissant au quotidien pour maintenir, vaille que vaille, les équilibres sociaux dans les quartiers fragiles peuvent entrevoir une lueur d’espoir; le Président a annoncé un  «grand plan» les assurant de financements pluriannuels. C’est ce que nous réclamions après l’annonce des 15 millions d’euros dédiés aux grandes associations.

Bien sûr, le Président a reconnu que nos exigences quant aux emplois aidés d’utilité sociale sont fondées, d’une part pour permettre à des personnes exclues du travail de mettre un pied à l’étrier et se définir un projet d’insertion et de formation professionnelle et d’autre part, pour aider les acteurs de terrain, notamment associatifs, à jouer leur rôle avec un renfort en ressources humaines.

Bien sûr, la demande que nous formulons depuis des mois de la création d’une « cour d’équité territoriale » a été jugée intéressante par le Président qui s’est dit « ouvert » à l’idée.

Bien sûr, les Jeux olympiques de Paris 2024 doivent être un formidable accélérateur de la pratique sportive dans nos villes jeunes et populaires.

Mais le Président de la République a indiqué qu’il était juste là « pour entendre [la] part de vérité [des élus et associations] » et qu’il n’entendait pas «répondre de manière systématique ». Et, en effet, l’échange sur quelques points soulevés par Ville & Banlieue a bien eu lieu, mais quelques exemples attestent de l’inquiétante insuffisance des réponses présidentielles…

rien n’est dit sur les crédits devant être dédiés aux petites associations, alors même que nombre d’entre elles, à l’instar des clubs sportifs, subissent les contrecoups des coupes drastiques dans le budget national ;
la réponse au problème des emplois aidés par l’extension aux associations du dispositif des emplois francs n’apportera rien puisque l’aide de l’État à ces postes est limitée à 2500 euros annuels en cas de CDD ou 5000 euros en cas de CDI, appuis très en deçà des aides allouées antérieurement aux contrats d’accompagnement dans l’emploi (CAE), pouvant atteindre plus de 90% du coût du poste, dont nous portons l’exigence ;
il n’a pas été répondu à la nécessité de préserver les commerces de proximité en maintenant et renforçant les dispositifs d’exonérations fiscales et sociales ;
face à la nécessité de prolonger la rénovation urbaine et humaine de nos quartiers par la rénovation durable du regard porté sur ces derniers, le Président n’a pas fait part d’une volonté d’insuffler des actions fortes permettant d’engager les médias, les acteurs audiovisuels et les GAFA autour de cet enjeu, afin que les investissements consentis dans les territoires urbains deviennent pérennes et permettent une image et une attractivité renforcée ;
aucune annonce n’a été faite aux questions relatives au soutien aux collectivités, pourtant en première ligne pour le maintien des équilibres sociaux (dotations, compensations d’exonérations d’impôts et taxes, compensations des mesures imposées par l’État et assumées par les territoires, exclusion des charges résultant des politiques d’État des contrats de ville, REP, ZSP, du calcul des évolutions budgétaires au titre du pacte financier dit « de Cahors », etc.).

N’annonçant aucun calendrier, aucune rectification budgétaire, aucune piste vers un déploiement des services publics, aucune perspective d’un plan global, le Président de la République n’a manifesté ni ambition réelle, ni dynamique collective, ni stratégie volontaire.

C’est inquiétant lorsque des voix s’élèvent pour remettre en cause la loi Solidarité Renouvellement Urbain et l’obligation de 25% de logement social, stigmatisant ainsi leurs locataires.

Plus alarmant encore, car assumant un choix de s’exonérer du Législateur et des élus des territoires, le Président a annoncé que c’est une instance d’où ceux-ci, pourtant légitimement élus par les habitants, sont exclus, en l’occurrence le Conseil présidentiel des villes, qui est chargée de préparer un « plan anti-ghetto ».

Et aucune référence n’a été faite au fond du problème des six millions d’habitants des quartiers urbains fragilisés : celui de la pauvreté et d’un pouvoir d’achat chaque jour plus en berne, des failles dans la protection de l’enfance, de la ségrégation sociale, économique et urbaine, de l’inégalité face aux droits fondamentaux. Et pourtant, c’est par tout cela que passe l’émancipation de la personne humaine.

Les territoires urbains fragiles ont vécu une dédaigneuse déception avec le rejet présidentiel des « cahiers de la co-construction » et du « rapport Borloo » le 22 mai dernier. Pareille méprisante désillusion ne peut se reproduire le 15 mars à l’issue du « Grand débat national ».

Les citoyens de nos villes populaires pauvres n’attendent pas quelques « mesurettes ». Ils ne demandent pas l’aumône, mais aspirent à vivre décemment, réclament justice et réparation au nom de l’égalité républicaine et de la dignité sociale et humaine. Il y a urgence d’une ambition collective partagée.

Ville & Banlieue tient à apporter sa contribution au « Grand débat national ».

Ville & Banlieue demande l’installation d’un nouveau cadre de travail et une rencontre avec le Président de la République.

Contact : Sylvie THOMAS, déléguée générale – 06 77 89 78 82